Le Conseil d’Etat apporte d’utiles précisions sur l’interdiction de conclure des accords cadres sans maximum selon qu’il s’agit d’une procédure formalisées rentrant dans le champs d’application de la directive 2014/24/UE du Parlement et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics ou pas.
Par son arrêt du 17 juin 2021, Simonsen Weel A/S c/ Region Nordjylland og Region Syddanmark (C-23/20), la Cour de justice de l’Union européenne a dit pour droit, sans prévoir une application différée dans le temps de cette interprétation, que les dispositions de la directive 2014/24/UE du Parlement et du Conseil du 26 février 2014 sur la passation des marchés publics doivent être interprétées dans le sens que (1) l’avis de marché doit indiquer la quantité et/ou la valeur estimée ainsi qu’une quantité et/ou valeur maximale des produits à fournir en vertu d’un accord-cadre et qu’une fois que cette limite aurait été atteinte, ledit accord-cadre aura épuisé ses effets et que (2) l’indication de la quantité ou de la valeur maximale des produits à fournir en vertu d’un accord-cadre peut figurer indifféremment dans l’avis de marché ou dans le cahier des charges.
Il résulte de cet arrêt que, pour tout appel à concurrence relatif à un marché destiné à être passé sous la forme d’un accord-cadre qui, eu égard à son montant, entre dans le champ d’application de cette directive, autrement dit, pour toutes les procédures formalisées, l’avis de publicité doit comporter la mention du montant maximal en valeur ou en quantité que prévoit l’acheteur public. Cette indication peut figurer soit (1) dans l’avis de marché, soit (2) dans les documents contractuels mentionnés dans l’avis de marché et librement accessibles à toutes les personnes intéressées.
Dans son arrêt du 28 janvier 2022, le Conseil d’Etat rappelle qu’il en va différemment que pour les accords-cadres qui ne sont pas régis par cette directive, autrement dit, pour toutes les procédures inférieurs aux seuils des procédures formalisées, pour lesquels le décret du 23 août 2021, modifiant notamment les dispositions de l’article R. 2162-4 du code de la commande publique, a supprimé la possibilité de conclure un accord-cadre sans maximum, en différant, en son article 31, l’application de cette règle aux avis de marché publiés à compter du 1er janvier 2022 afin de ne pas porter une atteinte excessive aux intérêts privés et publics en cause.
En d’autres termes, l’obligation d’indiquer un montant maximal en valeur ou en quantité s’impose :
Cet arrêt fait suite aux différentes ordonnances de référé précontractuel contradictoires sur la portée de la règles rendues par la juridiction administratives: voir notre précédent article.
Dans son arrêt du 28 janvier 2022, le Conseil d’Etat rappelle qu’un candidat évincé est susceptible d’être lésé par l’absence d’indication dans les documents de la consultation de la quantité ou la valeur maximale des produits à fournir dès lors que ce manquement ne permet pas de présenter une offre adaptée aux prestations maximales auxquelles elle pourrait être amenée à répondre.
Reste maintenant à déterminer si cette irrégularité qui porte est de nature à remettre en cause le classement des offres, et partant, le choix du titulaire du marché, sera considérée comme un vice d’une particulière gravité de nature à remettre en cause le contrat. Rien n’est moins sûr compte tenu de la jurisprudence actuelle du Conseil d’Etat..
CE 28 janvier 2022, communauté de communes Convergence Garonne, n°456418
Considérant ce qui suit :
Il résulte de l’arrêt de la Cour de justice de l’Union européenne mentionné au point 5 que, pour tout appel à concurrence relatif à un marché destiné à être passé sous la forme d’un accord-cadre qui, eu égard à son montant, entre dans le champ d’application de cette directive, l’avis publié à cet effet doit comporter la mention du montant maximal en valeur ou en quantité que prévoit le pouvoir adjudicateur, cette indication pouvant figurer indifféremment dans l’avis de marché ou dans les documents contractuels mentionnés dans l’avis de marché et librement accessibles à toutes les personnes intéressées. Il n’en va différemment que pour les accords-cadres qui ne sont pas régis par cette directive, pour lesquels le décret du 23 août 2021, modifiant notamment les dispositions de l’article R. 2162-4 du code de la commande publique, a supprimé la possibilité de conclure un accord-cadre sans maximum, en différant, en son article 31, l’application de cette règle aux avis de marché publiés à compter du 1er janvier 2022 afin de ne pas porter une atteinte excessive aux intérêts privés et publics en cause.
D’une part, après avoir relevé, par une appréciation souveraine exempte de dénaturation, que ni l’avis de marché, ni le cahier des clauses techniques particulières, ni aucune autre pièce du marché ne mentionnait la quantité ou la valeur maximale des produits à fournir dans le cadre du lot n° 1 de l’accord-cadre en litige, qui relève du champ d’application de la directive du 26 février 2014 mentionnée ci-dessus, et, d’autre part, après avoir souverainement estimé qu’en l’espèce, l’absence de cette information n’avait pas mis la société Coved à même de présenter une offre adaptée aux prestations maximales auxquelles elle pourrait être amenée à répondre, le juge du référé précontractuel du tribunal administratif de Bordeaux n’a pas inexactement qualifié les faits soumis à son appréciation en jugeant que la communauté de communes Convergence Garonne avait manqué à ses obligations de publicité et de mise en concurrence et que la société Coved avait pu être lésée par ce manquement et était ainsi fondée à demander l’annulation de la procédure de passation du lot en litige.
D E C I D E :
Article 1er : Le pourvoi de la communauté de communes Convergence Garonne est rejeté.
Article 2 : La communauté de communes Convergence Garonne versera à la société Coved la somme de 3 000 euros au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative.
CE 28 janvier 2022, communauté de communes Convergence Garonne, n°456418:interdiction de conclure des accords-cadres sans maximum