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Critères de recevabilité des offres pour un marché subséquent : c’est oui !

CAA Paris, 6ème Chambre, 7 mai 2025, Société Ricoh France, n° 22PA02782

Ce qu’il faut retenir :

La cour administrative d’appel de Paris valide l’introduction de critères de recevabilité des offres lors de l’attribution d’un marché subséquent, estimant qu’il n’y a pas de remise en cause de la mise concurrence de l’accord-cadre dès lors que le principe-même de ce « filtrage » avait été annoncé et a donc respecté le principe fondamental de transparence.

Enseignement n° 1 : L’auteur d’une offre irrégulière peut contester la validité d’un contrat au titre de l’irrégularité de son éviction

En application de la jurisprudence Département du Tarn-et-Garonne du Conseil d’État (CE, 4 avril 2014, n° 358994) qui veut que tout tiers puisse contester la validité d’un contrat administratif, la cour administrative d’appel de Paris a examiné le recours d’un des quatre titulaires de l’accord-cadre de fourniture de copieurs multifonctions attribué par la SNCF. Le juge d’appel commence par rappeler la règle de principe selon laquelle, hormis le préfet et les membres de l’organe délibérant de l’acheteur, les tiers requérants ne peuvent invoquer que des vices d’ordre public ou des vices en rapport direct avec leur éviction. Dans le même temps, « au titre de tels manquements, le concurrent évincé peut contester la décision par laquelle son offre a été écartée comme irrégulière ».

En l’espèce, la société Ricoh France contestait la validité d’un marché subséquent pour l’attribution duquel elle avait présenté une offre, écartée comme irrégulière. Le motif de ce rejet tenait à l’application de critères – ou plutôt de conditions ? – de recevabilité de l’offre. Dans les documents de la consultation de l’accord-cadre, l’acheteur avait défini ses exigences techniques de façon graduelle autour de trois degrés de contraintes : ” F0 “ pour une exigence non négociable devant absolument être satisfaite, à peine d’irrecevabilité de l’offre ; ” F1 ” pour une exigence peu négociable ; et ” F2 ” pour une exigence négociable.

Enseignement n° 2 : Le principe de transparence gouverne la conformité des critères de recevabilité des offres pour les marchés subséquents

La cour valide dans un premier temps le principe-même de ce mécanisme de « critère de recevabilité de l’offre » en s’appuyant sur le principe fondamental de transparence et sur sa traduction appliquée aux accords-cadres dans le code de la commande publique. En effet, ses articles R.2162-7, R.2162-11 et R.2162-12 renvoient tous à l’accord-cadre le soin d’énoncer les critères « d’attribution » des marchés spécifiques. La cour en déduit que le réel enjeu ne tient pas tant à la nature particulière de ces critères de recevabilité des offres (effet d’éviction total), mais à la question de savoir si l’accord-cadre en litige avait apporté une information appropriée aux candidats.

Or les documents de la consultation de l’accord-cadre avaient bien annoncé l’existence d’un tel filtrage : « l’analyse des offres prévoyait d’abord la vérification des offres, en fonction des critères de recevabilité définis dans les règlements de consultation, avant l’analyse et le classement des offres au regard des critères d’attribution et de leur pondération ». Ces documents annonçaient clairement l’opposabilité d’exigences techniques non négociables ” F0 ” mais, surtout, les différents points de recevabilité ” F0 ” étaient déjà énoncés dans les cahiers des prescriptions spéciales et le cahier des charges de l’accord-cadre.

Il n’y a pas non plus de modification substantielle de l’accord-cadre en ce sens, quand bien même l’acheteur aurait décliné ces exigences en critères plus spécifiques lors de l’attribution du marché subséquent.

Enseignement n° 3 : Les critères de recevabilité des offres pour les marchés subséquents ne constitue pas une méthode de notation neutralisante

De là, la cour en déduit que puisque problème de transparence il n’y a pas, la société Ricoh France ne peut pas soutenir que la SNCF lui aurait appliqué des critères d’attribution disproportionnés par rapport au critère du prix. On retrouve en creux l’argument de la pondération neutralisante d’un critère d’attribution. C’est donc tout aussi en creux que la cour distingue, et valide, les critères d’attribution qui par leur nature relèvent d’une appréciation qualitative et échelonnée, et ces critères de recevabilité des offres qui constituent de véritables conditions sine qua non d’admissibilité à l’analyse. Mais finalement, n’est-ce pas qu’une autre manière d’exprimer le fait qu’une offre est irrégulière lorsqu’elle ne respecte pas les prescriptions obligatoires du cahier des charges… ?


CAA Paris, 7 mai 2025, Société Ricoh France, n° 22PA02782

Considérant ce qui suit :

1. Par un avis de marché n° PSA43311, publié au Journal officiel de l’Union européenne le 16 septembre 2017, l’établissement public industriel et commercial SNCF, agissant en son nom et pour le compte des établissements publics industriels et commerciaux SNCF Mobilités et SNCF Réseau, agissant en qualité d’entités adjudicatrices, a engagé une procédure de passation d’un accord-cadre multi-attributaires de fourniture de systèmes d’impression bureautique avec consommables, pièces détachées, maintenance et prestations associées, comprenant deux lots, dont le lot n° 1 relatif à la fourniture de copieurs multifonctions (MFP). Après la passation d’un premier marché subséquent, les quatre titulaires de ce lot, dont la société Ricoh France, ont été invités, le 29 janvier 2021, à remettre une offre pour le marché subséquent n° 2 devant être conclu avec la société anonyme SNCF, venue aux droits, à compter du 1er janvier 2020, de l’établissement public SNCF, et les autres sociétés du groupe SNCF, les sociétés SNCF Réseau, SNCF Gares et Connexions, Fret SNCF et SNCF Voyageurs. Par un courrier électronique du 26 mars 2021, confirmé par une lettre du 28 avril suivant, la société SNCF a informé la société Ricoh France du rejet de son offre comme irrecevable. La société Ricoh France, qui agit en tant que concurrent évincé, a saisi le tribunal administratif de Paris d’une demande tendant à l’annulation ou à la résiliation de ce marché subséquent. Par un jugement du 3 mai 2022, dont la société Ricoh France relève appel, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande. Par la voie de l’appel incident, la SNCF demande que le jugement soit réformé en ce qu’il fonde l’introduction des exigences F0 au stade du marché subséquent n° 2 sur l’article 13.3 du cahier des prescriptions spéciales et non sur l’article R. 2162-7 du code de la commande publique.

Sur la régularité du jugement attaqué :

2. Si la société requérante soutient que le jugement attaqué est entaché d’erreurs de droit, de fait et d’appréciation, ces griefs, à les supposer établis, sont sans incidence sur la régularité du jugement attaqué.

Sur le bien-fondé du jugement attaqué :

3. Indépendamment des actions dont disposent les parties à un contrat administratif et des actions ouvertes devant le juge de l’excès de pouvoir contre les clauses réglementaires d’un contrat ou devant le juge du référé contractuel sur le fondement des articles L. 551-13 et suivants du code de justice administrative, tout tiers à un contrat administratif susceptible d’être lésé dans ses intérêts de façon suffisamment directe et certaine par sa passation ou ses clauses est recevable à former devant le juge du contrat un recours de pleine juridiction contestant la validité du contrat ou de certaines de ses clauses non réglementaires qui en sont divisibles. Cette action devant le juge du contrat est également ouverte aux membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné ainsi qu’au représentant de l’Etat dans le département dans l’exercice du contrôle de légalité.

4. Si le représentant de l’Etat dans le département et les membres de l’organe délibérant de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné, compte tenu des intérêts dont ils ont la charge, peuvent invoquer tout moyen à l’appui du recours ainsi défini, les autres tiers ne peuvent invoquer que des vices en rapport direct avec l’intérêt lésé dont ils se prévalent ou ceux d’une gravité telle que le juge devrait les relever d’office. Un concurrent évincé ne peut ainsi invoquer, outre les vices d’ordre public dont serait entaché le contrat, que les manquements aux règles applicables à la passation de ce contrat qui sont en rapport direct avec son éviction. Au titre de tels manquements, le concurrent évincé peut contester la décision par laquelle son offre a été écartée comme irrégulière.

5. D’une part, aux termes de l’article 4 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 susvisée, alors en vigueur, applicable à l’accord-cadre en litige, dont les dispositions sont désormais codifiées dans le code de la commande publique : ” Les marchés publics soumis à la présente ordonnance sont les marchés et les accords-cadres définis ci-après. / (…) Les accords-cadres sont les contrats conclus par un ou plusieurs acheteurs soumis à la présente ordonnance avec un ou plusieurs opérateurs économiques ayant pour objet d’établir (…) les termes régissant les marchés subséquents à passer au cours d’une période donnée, notamment en ce qui concerne les prix et, le cas échéant, les quantités envisagées. (…) “.

6. D’autre part, aux termes de l’article R. 2162-2 du code de la commande publique, applicable au marché subséquent en litige : ” Lorsque l’accord-cadre ne fixe pas toutes les stipulations contractuelles, il donne lieu à la conclusion de marchés subséquents dans les conditions fixées aux articles R. 2162-7 à R. 2162-12 “. L’article R. 2162-6 du même code précise que : ” Les marchés subséquents (…) sont conclus ou émis entre les acheteurs identifiés à cette fin dans l’avis d’appel à la concurrence, dans l’invitation à confirmer l’intérêt ou, en l’absence d’un tel avis ou d’une telle invitation, dans un autre document de la consultation, et le ou les opérateurs économiques titulaires de l’accord-cadre. “. Aux termes de l’article R. 2162-7 de ce code : ” Les marchés subséquents précisent les caractéristiques et les modalités d’exécution des prestations demandées qui n’ont pas été fixées dans l’accord-cadre. Ils ne peuvent entraîner des modifications substantielles des termes de l’accord-cadre. “. Selon l’article R. 2162-11 de ce code : ” Pour les entités adjudicatrices, les marchés subséquents sont passés sur la base de règles ou de critères objectifs et non-discriminatoires définis dans l’accord-cadre, qui peuvent inclure la remise en concurrence des titulaires. “. Enfin, aux termes de l’article R. 2162-12 de ce code : ” Lorsqu’une remise en concurrence est prévue, l’entité adjudicatrice fixe un délai suffisant pour permettre la présentation des offres. Le marché subséquent est attribué à celui ou à ceux des titulaires de l’accord-cadre qui ont présenté les offres économiquement les plus avantageuses, sur la base des critères d’attribution définis dans l’accord-cadre. “.

7. En outre, selon le I de l’article 31 de l’ordonnance du 23 juillet 2015 susvisée, alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises à l’article L. 2111-2 du code de la commande publique : ” Les prestations à réaliser sont définies par référence à des spécifications techniques. “. Aux termes de l’article 6 du décret du 25 mars 2016 susvisé, alors en vigueur, dont les dispositions ont été reprises aux articles R. 2111-4, R. 2111-8 et R. 2111-10 du code de la commande publique : ” I.- Les spécifications techniques définissent les caractéristiques requises des travaux, des services ou des fournitures qui font l’objet du marché public. / Ces caractéristiques peuvent également se référer au processus ou à la méthode spécifique de production ou de fourniture des travaux, des produits ou des services demandés ou à un processus propre à un autre stade de leur cycle de vie même lorsque ces facteurs ne font pas partie de leur contenu matériel, à condition qu’ils soient liés à l’objet du marché public et proportionnés à sa valeur et à ses objectifs. / (…) II. – Les spécifications techniques sont formulées : / (…) 2° Soit en termes de performances ou d’exigences fonctionnelles. Celles-ci sont suffisamment précises pour permettre aux candidats de connaître exactement l’objet du marché public et à l’acheteur d’attribuer le marché public. Elles peuvent inclure des caractéristiques environnementales ou sociales ; (…) “. Aux termes de l’article 7 de ce décret, désormais codifié à l’article R. 2111-11 du code de la commande publique : ” (…) Lorsque l’acheteur définit une spécification technique en termes de performances ou d’exigences fonctionnelles, il ne peut pas rejeter une offre si celle-ci est conforme à une norme ou à un document équivalent correspondant à ces performances ou exigences fonctionnelles. Le soumissionnaire prouve, par tout moyen approprié, que cette norme ou ce document équivalent correspond aux performances ou exigences fonctionnelles définies par l’acheteur. “.

8. En l’espèce, l’article 13.2 du cahier des prescriptions spéciales (CPS) du ” contrat-cadre de fourniture de système d’impression bureautique “, valant accord-cadre, et relatif au lot n° 1 ” location et acquisition de copieurs multifonctions (MFP) avec consommables, pièces détachées, maintenance et prestations associées “, prévoyait que : ” Les Marchés subséquents sont mis en place au fur et à mesure de la définition des besoins par le Client pendant la durée du Contrat (voir article ” Durée du Contrat ” du présent CPS). / Les attributaires des Marchés subséquents sont déterminés par mise en concurrence des sociétés référencées (Titulaires du présent Contrat). Cette mise en concurrence se fait par consultation des sociétés référencées. Au terme de la mise en concurrence, un seul attributaire sera désigné comme Titulaire du Marché subséquent. / Ces consultations se font sur la base : / d’un Cahier des Charges techniques ; / d’un CPSP ; / – d’un Règlement de Consultation précisant les critères d’attribution du Marché subséquent et leur pondération. / Les conditions contractuelles des Marchés subséquents sont celles du présent Contrat. Elles peuvent être complétées de conditions particulières propres aux Marchés subséquents concernés. / Néanmoins, ces dernières ne peuvent en aucun cas apporter des modifications substantielles aux stipulations du présent Contrat. / (…) L’attribution de Marché subséquent se fait sur la base de critères techniques et financiers spécifiques au Marché subséquent. “.

9. Il résulte d’abord de l’article 18 du règlement de consultation de l’accord-cadre en litige et du point 11.2 du chapitre 10 du règlement externe de consultation du marché subséquent n° 2 que l’analyse des offres prévoyait d’abord la vérification des offres, en fonction des critères de recevabilité définis dans les règlements de consultation, avant l’analyse et le classement des offres au regard des critères d’attribution et de leur pondération, après demande de précisions éventuelles sur les offres . L’article 16 du règlement de consultation de l’accord-cadre en litige prévoyait que les offres seraient déclarées irrecevables en cas de non-respect par les soumissionnaires des critères de recevabilité énumérés à cet article au nombre desquels figurait le respect des points de recevabilité ” F0 ” des cahiers des prescriptions spéciales et du cahier des charges. Cet article précisait qu’il s’agissait d’une exigence non négociable devant absolument être satisfaite, une offre qui ne remplirait pas une exigence ” F0 ” n’étant pas recevable et n’étant pas analysée. Les critères ” F0 ” étaient repris dans les grilles de conformité au contrat et au cahier des charges, dont les trames étaient annexées au règlement et constituaient l’une des pièces de l’offre technique des soumissionnaires

10. Ensuite, l’avis de marché n° PSA43311, publié au Journal officiel de l’Union européenne le 16 septembre 2017, indiquait que le prix n’était pas le seul critère d’attribution et que tous les critères étaient énumérés uniquement dans les documents du marché. L’article 13.3 du cahier des prescriptions spéciales de l’accord cadre prévoyait que les marchés subséquents seraient attribués en fonction de l’ensemble ” critères financiers “, pondéré à 80% et de l’ensemble ” critères techniques ” pondéré à 20 %, ces derniers étant définis en niveaux d’exigence ” F1 ” (exigence peu négociable, peu de marge d’action) et ” F2 ” (exigence négociable), cette méthode de notation et la pondération des critères d’attribution étant rappelées au point 11.1 du chapitre 10 du règlement externe de consultation du marché subséquent n° 2. L’article 13.3 précise que : ” La notation technique des marchés subséquents se fera sur la base des réponses apportées, lors de la remise en concurrence entre les attributaires [de l’] accord-cadre, au cahier des charges (…). / Toutefois, il est entendu que la notation de la partie technique pourra prendre en compte des évolutions technologiques en lien avec l’objet du marché, lesquelles pourraient être regardées comme permettant une amélioration de la qualité des Prestations et des Fournitures objet du présent Contrat. / A cette occasion, le Cahier des Charges pourra être modifié en conséquence à chaque remise en concurrence en vue de l’attribution des marchés subséquents. / SNCF procédera aux tests définis dans le Cahier des Charges avant attribution des Marchés subséquents. / A l’issue des tests techniques, SNCF pourra être amenée à déclarer une offre irrecevable comme étant irrégulière dans l’hypothèse où les tests techniques révèleraient qu’un des critères F0 du Cahier des Charges n’est pas respecté. “.

11. Le tableau de conformité annexé au règlement de consultation du marché subséquent en litige comportait notamment un critère n° 17, affecté du niveau d’exigence F0, ainsi formulé : ” Les techniciens SNCF doivent être en capacité de pouvoir vérifier (localement et à distance) le paramétrage des compteurs suivants : /- Une copie au format A3 incrémente le compteur de copie d’une unité, /- Une copie au format A4 incrémente le compteur de copies d’une unité (1 A4 = 1 A3), le titulaire devra fournir gratuitement un outil informatique qui permettra à SNCF en autonomie de procéder à cette vérification de masse (localement et à distance). Le mémoire technique devra détailler le fonctionnement de cet outil “. Ce tableau comportait également un critère n° 48, également affecté du niveau d’exigence F0, qui prévoyait que le mémoire technique devait présenter et décrire un exemple de la fiche technique d’intégration.

12. Il résulte de l’instruction que pour déclarer irrecevable l’offre de la société Ricoh France, la SNCF a estimé que cette dernière n’était pas conforme aux standards techniques imposés par les documents de la consultation, s’agissant en particulier des critères n° 17 et 48 mentionnés au point 11.

13. En premier lieu, il résulte des dispositions précitées du code de la commande publique, qui reprennent les anciennes dispositions de l’article 79 du décret du 25 mars 2016 relatif aux marchés publics, que l’information appropriée des candidats sur les critères d’attribution des marchés subséquents à un accord-cadre est nécessaire dès l’engagement de la procédure d’attribution de l’accord-cadre, dans l’avis d’appel public à la concurrence ou le cahier des charges tenu à la disposition des candidats. Or, il résulte de l’article 18 du règlement de consultation de l’accord-cadre en litige que cette information a bien été apportée. Ce premier moyen doit donc être écarté.

14. En deuxième lieu, il résulte de ce qui a été dit au point 9, et ainsi que cela avait été annoncé dans les documents de la consultation que les critères affectés d’une exigence ” F0 ” (exigence non négociable), repris dans les grilles de conformité et dont la définition est restée inchangée, permettaient à la SNCF de vérifier la recevabilité des offres, avant de procéder à leur analyse et leur classement sur la base des critères d’appréciation annoncés, dont l’ensemble des critères techniques, notés selon les niveaux d’exigence ” F1 ” (exigence peu négociable, peu de marge d’action) et ” F2 ” (exigence négociable). Par suite, la société Ricoh France n’est pas fondée à soutenir que les critères de conformité des offres qui correspondent aux spécifications techniques mentionnées au point 6, formulées en termes d’exigences fonctionnelles, en particulier les critères n°17 et n°48 précités, constitueraient en réalité des critères d’appréciation des offres, lesquels seraient disproportionnés par rapport au critère du prix. Ce deuxième moyen doit donc également être écarté.

15. En troisième lieu, la société requérante soutient que les critères n° 17 et n°48 ont été ajoutés par rapport au règlement de consultation de l’accord-cadre et que cet ajout constitue une modification substantielle prohibée par l’article R. 2162-7 précité du code de la commande publique Toutefois, il résulte de ce qui a été dit ci-dessus que les candidats ont été informés au stade de l’accord-cadre de ce que la SNCF pourrait être amenée à déclarer une offre irrecevable comme étant irrégulière dans l’hypothèse où les tests techniques révèleraient qu’un des critères F0 du cahier des charges n’aurait pas été respecté. Il s’ensuit que la société Ricoh France n’est pas fondée à soutenir que les termes de l’accord-cadre en litige auraient fait l’objet de modifications substantielles en ce qui concerne les deux critères en cause.

16. En quatrième lieu, le moyen tiré du caractère infondé des motifs par lesquels la SNCF a déclaré son offre irrecevable au regard des exigences n° 17 et n° 48 doit être écarté par adoption des motifs retenus à bon droit par les premiers juges aux points 20 et 21 du jugement attaqué.

17. En dernier lieu, les moyens tirés de l’irrégularité de la procédure de passation du marché subséquent litigieux en ce que les documents de consultation n’indiquaient pas le montant maximum en valeur ou quantité des prestations objet de l’accord-cadre, et faute pour la SNCF d’avoir défini avec une précision suffisante les exigences relatives au contenu de la prestation, qui ne sont pas d’ordre public, sont sans rapport direct avec l’éviction de la société requérante. Ces moyens doivent donc être écartés comme inopérants.

18. Il résulte de tout ce qui précède que la société Ricoh France n’est pas fondée à soutenir que c’est à tort que, par le jugement attaqué, le tribunal administratif de Paris a rejeté sa demande.

Sur les conclusions incidentes de la SNCF :

19. Les conclusions à fin d’appel incident de la SNCF tendent à l’infirmation d’un des motifs du jugement attaqué alors que ce dernier qui a rejeté intégralement la requête de la société Ricoh France ne lui fait pas grief. Ces conclusions ne peuvent donc qu’être rejetées comme irrecevables.

Sur les frais du litige :

20. D’une part, les dispositions de l’article L761-1 du code de justice administrative font obstacle à ce que la SNCF, qui n’est pas pour l’essentiel la partie perdante dans le présent litige, verse une somme à la société Ricoh France au titre des frais exposés par elle et non compris dans les dépens. D’autre part, il y a lieu dans les circonstances de l’espèce de mettre à la charge de la société Ricoh France au titre du même article une somme de 1 500 euros à verser à la SNCF et une somme globale de 1 500 euros à verser aux sociétés SCC France, Xerox, Xerox financial services et Rigby capital.

DÉCIDE :

  • Article 1er : La requête de la société Ricoh-France est rejetée.
  • Article 2 : Les conclusions à fin d’appel incident de la SNCF sont rejetées.
  • Article 3 : La société Ricoh-France versera au titre de l’article L. 761-1 du code de justice administrative, d’une part, une somme de 1 500 euros à la SNCF, d’autre part, une somme globale de 1 500 euros aux sociétés SCC France, Xerox, Xerox financial services et Rigby capital.
  • Article 4 : Le présent arrêt sera notifié à la société Ricoh-France, à la SNCF et aux sociétés SCC France, Xerox, Xerox financial services et Rigby capital.

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Table des matières
Accord-cadre à marchés subséquents,
Obligation d'informer les candidats des conditions d'attribution,
offres pour un marché subséquent,
Possibilité de prévoir des critères de recevabilité des offres,
Principe de transparence,
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